samedi 29 août 2015

Notes sur la religion, dans son rapport au communisme (3)

 
Le moine bleu : 
Une Assemblée générale qui tourne au drame 
(sous-titre : Tout ce qui divise la classe ouvrière est mauvais), 
 vers 2012 ap. J.-C.

Un temps s'avance, plus guère lointain, où les derniers djihadistes survivants de Syrie, d'Irak, du Val-de-Marne et d'ailleurs, éclopés, épuisés, ayant perdu successivement la jambe gauche, le poumon arrière puis le testicule droit au cours de moult batailles acharnées, auront désormais à coeur d'employer le temps et les organes qui leur restent à servir différemment la gloire du Seigneur : en d'autres termes à faire des affaires sous son soleil d'airain. Ils pourront, ce jour-là, se souvenir que M. Erdogan, islamiste modéré, c'est-à-dire grand massacreur modéré de kurdes, d'athées et de révolutionnaires turcs, avait, de très longue date déjà, fourni le modèle impeccable d'une telle parfaite reconversion, d'un alliage idéal - et même idéhallal, si l'on nous passe ce néologisme douteux - du capitalisme le plus violent, le plus impitoyable, le plus dénué de sentiments, en deux mots : le plus efficace et macronien, avec la rigueur morale suprêmement digne qu'exige à chaque instant le service fidèle du Très-miséricordieux. L'Arabie saoudite, l'Indonésie (ou le Qatar, bien entendu, charmant micro-pays folklorique ami de la France des Lumières, dont il détient désormais, comme chacun sait, les conditions expresses du rêve permanent sous forme d'hôtels de luxe ou de clubs de football) pourront alors également offrir à nos délicats vétérans l'exemple absolu de cette tartufferie splendide (au sens noble) laissant-faire et laissant-passer en matière économique (sans oublier de laisser massacrer, évidemment, tout ce qui - dans un tel cadre idyllique - pourrait ressembler à une révolte, ou à une simple protestation de travailleurs réduits en esclavage) cependant, donc, qu'elle reste intraitable sur le plan des moeurs, de la religion, du respect perpétuel des meilleures bienséances, bref : sur le plan des valeurs. Et alors, notre djihadiste de Syrie, ayant jadis tout donné à la cause, s'étant autrefois grisé de ces belles folies de jeunesse qu'auront été pour lui les décapitations de masse au couteau rouillé, les viols collectifs d'enfants mécréants de douze ans ou la destruction systématique à l'explosif de trésors archéologiques hellénistiques d'inestimable importance, se plongera, une dernière fois, dans la pure extase mystique en toute innocence, devant ces gigantesques buildings d'acier dont quelque ancien collègue de combat lui aura délégué, d'un geste imperceptible, la charge de l'érection proéminente puis, en tournant le regard à l'ouest, ces stades de coupe du monde, délicieux et saillis, sous ses nouvelles responsabilités managériales, en quelques mois, à peine, des entrailles de la Terre pétrolifère, à coups de trique assénés, jusqu'à la mort au besoin - lorsque les délais et la conjoncture l'auront exigé - sur les épaules d'immigrés infidèles, et imbéciles. Là, songeant, décidément, à la belle réussite de synthèse de cet islam moderniste, de cet islam de paix, de cet islam de l'économie autant que des valeurs lequel, partout, succèdera - avec la bénédiction du monde, dans le suave concert des nations réconciliées - aux bien regrettables, sans doute ! aux malencontreux débordements enthousiastes de feu l'État islamique, notre héros entrepreneur d'aujourd'hui se dira, une fois encore, goguenard, et dans un sourire malicieux : «  Les valeurs, et les voleurs ! bordel de Dieu, il n'y a que ça de vrai ! »

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